• La période qui sépare la mort de Robert le Magnifique, duc de Normandie (1035), de la restauration du roi Edouard le Confesseur sur le trône d'Angleterre (1042) est contemporaine de la minorité puis de l'affirmation du pouvoir de Guillaume de Normandie (1035-1047).

    La Normandie que le jeune duc Guillaume reçoit en héritage est une province riche et bien administrée. Ses prédécesseurs ont su garder entre leurs mains de grands domaines qui leur donnent les moyens de récompenser les vassaux fidèles et de doter d'importantes fondations monastiques. Le droit de battre monnaie est resté le monopole du prince et lui procure d'abondantes ressources. Le commerce profite des liens maintenus avec le monde anglo-saxon.

    L'expansion normande se poursuit, notamment vers l'Italie méridionale, suivant les anciennes routes de pèlerinage. C'est un indice de la croissance de la population, comme la tendance nouvelle des petits lignages à écarter les cadets des droits de succession. Des Normands sont présents également dans l'entourage du roi d'Angleterre, Edouard le Confesseur, qu'ils ont aidé à regagner son trône.

    Dans beaucoup de principautés, le début du XIe s. est marqué par les revendications à l'autonomie de seigneurs de second rang qui s'affrontent dans des guerres privées et se constituent des domaines sur des terres nouvellement défrichées ou au détriment des biens de l'Eglise et du prince. En Normandie ce comportement est puni par l'exil, autre source du flux d'émigration.

    Cette prospérité est un temps remise en cause par la disparition inopinée de Robert le Magnifique en 1035. Avant de faire valoir ses prétentions à la couronne d'Angleterre, Guillaume devra échapper aux intrigues, rétablir l'ordre dans son duché et repousser les attaques de princes voisins prompts à profiter de son affaiblissement passager


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  •  Richard II (996-1026)Illustration.


    A sa mort en 996 Richard I laisse un domaine pacifié depuis 30 ans à un enfant. Cette minorité permet une révolte générale de la paysannerie. Mais ce soulèvement n'est pas dirigé contre le pouvoir des descendants de Rollon. Il montre au contraire que la Normandie s'inscrit dans l'évolution de la société féodale à ses débuts. Les paysans tentent de repousser les pressions croissantes et les exactions de l'aristocratie.Simultanément, des troubles dans l'Hiémois, région de la Normandie centrale, sont, par contre, une tentative plus classique d'un membre de la famille régnante, Guillaume d'Exmes, de s'emparer du pouvoir. Les deux rébellions sont mâtées par les tuteurs du jeune Richard. La répression contre les paysans est particulièrement sanglante.Cette période de trouble permet aux vikings danois d'utiliser la Normandie comme base pour de nouveaux raids en Angleterre. Le roi Ethelred demande l'aide de Richard II et leur alliance est scellée par un mariage. Emma, sœur de Richard épouse Ethelred en 1002.De ce mariage découle une situation politique lourde de conséquences. La princesse normande Emma, veuve d'Ethelred épousera le danois Cnut, vainqueur en 1016 des héritiers d'Ethelred. Elle sera la mère du dernier roi danois d'Angleterre, Harthacnut (1040-1042). Or les fils d'Emma et d'Ethelred sont réfugiés à la cour de Richard. Le prince Edouard est élevé à la cour du duc de Normandie et s'entoure de compagnons normands. Quand il reprend son trône en 1042, les Normands sont directement impliqués dans les affaires de la couronne d'Angleterre.En France, Richard Il se comporte comme le vassal loyal du roi Robert le Pieux. Il participe avec lui à des expéditions en Bourgogne (1003, 1005) ou en Flandre (1006). En échange de quoi il obtient le soutien du roi dans ses propres guerres contre Foulque Nerra, comte d’Anjou ou Eudes de Blois, contre lesquels il n'hésite pas à employer encore des mercenaires vikings. Le Maine et la Bretagne sont des régions frontalières dont Richard II ne peut se désintéresser. Là encore, le mariage est un des instruments de la diplomatie. Richard II épouse Judith, soeur du comte de Rennes, Geoffroy, lequel épouse Havoise, soeur de Richard. Judith sera la première princesse chrétienne, épouse légitime d'un duc de Normandie, à lui donner un successeur en dehors des pratiques du concubinage "à la manière des Danois".Par ailleurs Richard II fait de son duché une des principautés les plus stables et les plus riches du royaume. Il est le premier à troquer le titre de comte de Rouen, pour celui de duc. Richard réutilise en grande partie les rouages de l’administration carolingienne et poursuit la réforme de l’Eglise, pilier du pouvoir ducal. En 1001 déjà, il faisait appel au réformateur italien Guillaume de Volpiano pour restaurer l’abbaye de Fécamp où les ducs ont leur palais et ont élu sépulture.


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  •  Le territoire concédé à l'autorité du comte Robert (Rollon) n’était nullement assuré de son destin qui aurait pu s'achever comme celui des Normands installés sur la Loire à la même époque, définitivement éliminés entre 937 et 939. Mais les successeurs de Rollon réussirent à s’imposer parmi les premiers princes du royaume.

    Le siège de Paris par les Normands - Albert Robida

     

    Guillaume Longue Epée, associé au pouvoir depuis 927, succède à Rollon en 933. Il est né d’une concubine franque et chrétienne de Rollon, Popa, fille d'un vaincu, le comte de Bayeux, et est donc lui même représentatif de l’assimilation rapide des conquérants.

     

    En 933, Guillaume obtient le Cotentin et l'Avranchin autrefois concédés aux Bretons en échange d'un changement d'alliance en faveur du roi Raoul (923-936) contre les partisans des derniers carolingiens. Mais c'est bien le comte de Rouen qui exerce la réalité du pouvoir sur les territoires conquis.

     

    Au même moment Guillaume eut à affermir son contrôle sur les éléments d’origine irlando-norvégienne également implantés en Cotentin et en Bessin. Il semble que les rebelles aient cherché à préserver leurs racines païennes, et les traditions d'organisation de la société scandinave qui reposent sur une grande autonomie du propriétaire libre par rapport à l'autorité politique. Ils sont donc peu disposés à entrer dans les liens de dépendance qui se développent dans la société franque et que le nouveau comte reprend à son profit.

     

    Dans le royaume franc, Guillaume est mêlé aux conflits qui opposent les chefs de l’aristocratie et le roi carolingien Louis IV (936-954) sous le regard du puissant roi de Germanie, Otton. Le comte de Rouen joue de la concurrence entre les deux autorités dont il relève en théorie : le roi de France, et, son seigneur direct, héritier des prérogatives du marquis de Neustrie, Hugues le Grand, duc des Francs. Le plus souvent Guillaume est allié à Hugues le Grand, mais en 940 il a provisoirement changé de camp et obtenu de Louis IV le renouvellement de la concession faite à Rollon. En 942 il meurt, victime d’un guet-apens tendu par le comte de Flandre hostile à la montée de la puissance normande.

     

    Dès la seconde génération, Guillaume Longue Epée avait été le premier prince normand authentiquement chrétien, favorisant notamment la restauration de l’abbaye de Jumièges. Il avait obtenu en mariage la fille du comte de Vermandois, et était entré dans la société des plus puissants seigneurs du royaume.


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