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ARNOULT DE BELLÉME
ARNOULT DE BELLÉME.
Mort en 1052
Arnoult, fils de Guillaume Il, après avoir contribué à l'expulsion de son père, ainsi que le racontent Ordéric Vital, et principalement Guillaume de Jumièges, qui écrivait son histoire à l'époque même où se passaient les faits qu'il y mentionne, partagea à son tour sa disgrâce et son exil. La haine des Giroye pour les Talvas était telle que, malgré les dispositions hostiles du fils contre le père, malgré le gage d'alliance que semblait leur garantir sa conduite dénaturée envers l'auteur de ses jours, il ne put néanmoins trouver grâce à leurs yeux; il fût également chassé et dépossédé des domaines paternels. Arnoult, dans sa détresse, alla demander un asile à Yves, évêque de Sées, son oncle paternel. On trouve sa souscription avec celle du prélat, apposée en bas d'une charte de Guillaume-le-Bâtard, due de Normandie , en faveur de l'abbaye de Saint-Rignier. Il souscrivit encore quelques autres chartes , émanées de son oncle.
Presque tous les historiens gardent le silence sur l'époque où mourut Arnoult, à l'exception de l'auteur de la statistique de l'Orne pour 1834, qui, dans la partie historique de son travail, fixe cette même mort à la date de 1052 sur la fin de l'année où mourut Talvas, son père.
Voici, selon les auteurs du temps, suivis en cela par les écrivains postérieurs, quelles furent les circonstances de la mort de ce jeune seigneur.
Comme il avait partagé les crimes de ses devanciers, il participa aussi à leur châtiment; une mort inopinée l'arrêta, à la fleur de son âge dans la carrière des vices où il avait vécu. Écoutons à ce sujet les sages réflexions d'un de nos vieux historiens:
" les enfants (dit Bry de la Clergerie), ne sont pas juges ni censeurs des mauvaises humeurs de leurs pères, et si Dieu le souffre quelquefois, c'est un denoyment de l'ordre commun, et le plus aspre chastiement qui se trouve pour punir les impiétés d'une race maudite. La main du fils est pour la gloire et le secours de son père, et non pour lever le baston sur celui qui lui a donné la vie, ni corriger les fautes et les vices sur lesquels il n'a autre juridiction et pouvoir que les voeux et les prières. La cruauté de Talvas est grande, mais l'impiété de son fils en surpasse l'horreur, et Dieu ne laisse l'une ni l'autre impunie. "
Arnoult, partant un jour avec quelques vassaux pour, ses excursions ordinaires, toujours accompagnées de rapines et de brigandages , suivant l'usage de ce temps, passa en chevauchant près de la retraite d'une pauvre religieuse qui élevait un petit porc; il lui prit fantaisie d'enlever cet animal, plutôt sans doute pour jouer un tour à la pauvre fille qu'alléché par l'appât du butin. Sa volonté fut aussitôt accomplie que connue : le petit cochon fut emporté malgré les cris et les prières de la malheureuse, qui poursuivit en pleurant et conjura le comte de vouloir bien lui rendre son petit porc.
Arnoult fut insensible à ses; réclamations et continua sa route. De retour à son logis il commanda à son cuisinier de lui préparer son gibier pour son souper. Ses ordres furent exécutés, et le mets, préparé, fut servi sur la table. Harassé de sa course, Arnoult, stimulé par la faim, mangea de bon appétit plusieurs morceaux du cochon; mais ce fut son dernier repas, car la nuit suivante il mourut dans son lit, très probablement victime (le sa gourmandise et à la suite d'une indigestion. on attribua cette mort au démon qui, pour le punir de son vol, l'avait dit-on étranglé.
La superstition du temps autorisait de semblables conjectures. D'autres écrivains ont prétendu que ce diable stranguIateur ne fut autre qu'Olivier, frère naturel d'Arnoult; mais des chroniques normandes et Guillaume de Jumièges, qui connaissait Olivier, du moins de réputation, rejettent cette imputation comme étant calomnieuse, Olivier s'étant toujours conduit comme un brave et féal chevalier qui, après s'être illustré par une foule d'actions, honorables au service de son prince, aspire à une gloire plus durable. Cet Olivier voulant cueillir des palmes inflétrissables renonça au monde sur le déclin de l'âge et s'enrôla sous les drapeaux du maître des rois en prenant l'habit religieux, dans l'abbaye du Bec.
Cette maison avait alors pour abbé le célèbre saint Anselme, que ses, vertus et ses mérites élevèrent dans la suite au siège archiépiscopal de Cantorbéry. Olivier vécut longtemps sous les livrées de la pénitence, dans sa paisible retraite , où il mourut, plein de jours et de vertus.
Quant au malheureux Giroye, que nous avons laissé au sortir des mains de ses bourreaux, il fut confié aux soins de son frère Raoul, dont les conseils, n'avaient pu l'éloigner de ce malheur. Raoul Mâle-Couronne, l'un des plus habiles de son temps dans l'art de guérir, parvint, à force de soins et grâce à sa science, à procurer à son frère une guérison aussi complète que la grandeur du mal pouvait le permettre.
Guillaume, en reconnaissance d'une guérison si peu espérée, partit pour la Terre Sainte, qu'il avait déjà visitée une fois.
Au retour de la Palestine, il alla cacher ses plaies sous l'habit monacal, dans l'abbaye du Bec. A sa sollicitation, Hugues et Robert de Grante-Mesnil, ses neveux, entreprirent, en 1050, de relever les ruines de l'ancienne abbaye d'Ouche, fondée par saint Evroult, et ruinée en 945 par le duc de France, Hugues-le-Grand, lors de son démélé avec Louis d'outre-mer. À la prière du même Giroye, le nouveau monastère fut bientôt richement doté par sa nombreuse famille et tous ses amis, auxquels il donna l'exemple le premier de tous.
Guillaume Giroye mourut, suivant les uns, dans le monastère où il s'était retiré, et, suivant Ordéric vital, à Cayette ou Gaëte, en Italie, où des affaires importantes avaient réclamé sa présence. il était dans un âge très avancé quand il termina sa carrière, le 5 février. il fut enterré dans l'église de Saint-François ou plutôt Saint-Érasme.
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