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ALAIN III DUC DE BRETAGNE Sa mort tragique à Vimoutiers (1er OCTOBRE 1040)
EXPÉDITION D'ALAIN III DUC DE BRETAGNE CONTRE MONTGOMMERI
Sa mort tragique à Vimoutiers (1er OCTOBRE 1040)
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La nature ne semble pas avoir préparé Vimoutiers pour les
rudes assauts de la guerre. Baigné par les eaux de sa gracieuse
rivière,
où se mirent de coquettes maisons, resserré entre les
gorges rapprochées de fertiles vallons, qui lui font, à droite et à
gauche, un rideau contre les vents et les tempêtes, c'est un lieu
paisible où l'on aime à goûter les joies du repos.
L'auteur des notices sur les cantons d'Argentan écrivait, il y
a quelques années, que votre chef-lieu et les communes de son
ressort «
paraissent avoir subi le passage des siècles sans enrichir les annales de faits dignes d'y être consignés.... Là, en
effet, point d'antiquités celtiques ou romaines, point de ruines
du moyen âge, qui trop souvent racontent les malheurs plus ou
moins glorieux des anciennes générations, mais qui, aussi,
jettent de l'intérêt dans les récits de l'historien »
Vous avez dans votre ville, une rue Alain, une cour de l'Ecu,
à laquelle se rattache la légende de la mort d'un puissant prince (3). Est-il vrai que cet Alain vint à Vimoutiers pour lier la révolte de Roger de Montgommeri, et faire le siège de son château ? Peut-on prouver qu'il y mourut empoisonné, le 1er octobre 1040, ainsi que continue de l'affirmer la tradition locale ?
**Allain III, fils de Geoffroi, qui le premier prit le titre de due de Bretagne, et de Hawise, fille de Richard I" et soeur de Richard II, «succéda en bas âge à Geoffroy, son père, sous la tutelle de Hawise, sa mère, qu'il perdit en 1034. Il mourut lui-même le 1" octobre 1040, et fut inhumé dans le chapitre de Fécamp. Il laissa de Berlhe, sa femme, un fils âgé seulement de trois mois, et une fille, nommée Hawise, femme d'Hoél, qui devint duc de Bretagne.
(Chronique des ducs de Normandie, par Benoît, t. II, p. 572)
Roger de Montgommeri ne tint pas longtemps la campagne.
Il jugea plus prudent de se renfermer clans l'enceinte de son
château-fort. Où était-il situé ? Dans quelles conditions était-il
établi ? C'est le problème qui s'impose actuellement à nos recherches et que je m'efforcerai de résoudre.
Évidemment, il faut en chercher l'assiette dans le voisinage de
Vimoutiers, au chef-lieu même des propriétés du belliqueux
baron (1). Mais il nous reste mieux que des suppositions.La motte fortifiée, qui a fait la principale défense de ce château,
s'est admirablement conservée jusqu'à nos jours ; et, malgré
quelques objections que j'ai entendu formuler, je ne crois pas
qu'il puisse y
avoir de doutes sérieux sur cette identification.
Lorsqu'on sort de Vimoutiers par la Grand'Rue, nommée
autrefois la rue Arse ou Brûlée, aujourd'hui rue Sadi-Carnot,
l'on trouve à droite, au bout d'un kilomètre, un vieux chemin se
dirigeant par la hauteur vers Sainte-Foy de Montgommeri.
Après l'avoir suivi durant 1,500 mètres, le voyageur aperçoit,
au sommet du coteau, une enceinte circulaire dont l'ancienne
destination est évidente. C'est une forteresse en terre établie de
main d'homme, un type admirablement conservé de la motte
féodale normande.
Avec un rayon d'environ quarante-cinq mètres, l'on a tracé
sur le plateau, entre le Champ de la Croix et le Champ de la
Ville, une circonférence tangente au vieux chemin qui, lui-même,
à cet endroit, suit la courbe de la forteresse. Suivant les contours
de cette circonférence, l'on a creusé des fossés à talus, très profonds, dont l'on a
rejeté les terres vers le centre, pour former
une butte artificielle. Sur le sommet a été établi le donjon, le
refuge, défendu lui-même par un talus ou vallum en terre.
Malgré la largeur et la profondeur des fossés, et la vigoureuse
défense des assiégés, il paraîtrait que le château de Montgommeri
ne put tenir longtemps contre l'investissement et les assauts des troupes d'Alain.
Tout cédait donc devant Alain ;
il n'avait plus qu'à jouir de son triomphe en présentant à son pupille les trophées de sa victoire.
Mais dans les derniers jours du siège, ou immédiatement après,
un complot est tramé contre lui. Quels en furent les instigateurs ?
De quel prétexte osa-t-on couvrir cet assassinat, plus odieux
encore lorsqu'il se produit au milieu des camps, comme si le
glaive n'était pas un ouvrier suffisant de la mort ?
Empoisonné.
Le fait certain est qu'Alain fut empoisonné. L'effet du poison
ne fut pas immédiat, et la légende conservée à Vimoutiers
indique encore, dans la Cour de l'Écu, l'étage où il fut transporté et l'escalier du haut duquel il se serait précipité, dans un
accès de rage causé par la violence des douleurs internes. Si la
légende dit vrai, l'habitation paraîtrait bien pauvre aujourd'hui
pour un prince. Mais rien n'oblige à croire qu'elle n'ait pas,
malgré sa vieillesse, changé de forme depuis huit cent cinquante six ans. Les chroniques de Saint-Méen, de Saint-Michel et de
Quimperlé marquent en effet la mort d'Alain au 1er octobre 1040;
cette date a été acceptée par les critiques d'histoire les plus
érudits et. les plus compétents.
Après la mort d'Alain, les habitants de Vimoutiers, sans
aucun doute étrangers à ces pratiques criminelles, donnèrent
pieusement l'hospitalité au corps du duc Alain, dans leur église
de Saint-Sauveur.
La dépouille mortelle du prince breton n'y resta pas longtemps.
Extrait de L'expédition d'Alain III, duc de Bretagne contre Montgommeri, sa mort tragique à Vimoutiers (1er octobre 1040) par P. Barret
Tags : alain, vimoutiers, mort, 1040, duc
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