• I- La jeunesse

    Daniel Balavoine, né le 5 février 1952 à Alençon à 7 h 05 dans une chambre de la clinique Saint-Joseph, d'Émile et d'Élisabeth Lamagdeleine, est le benjamin d'une famille déjà composée de six enfants, ce qui vaut à Mme Balavoine d'obtenir la médaille de bronze de la Famille française par décret du 16 avril 1951. Émile Balavoine, arrivé en 1946 à Alençon, exerce la profession d'aide-comptable au Service départemental du ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme, installé dans des baraquements situés sur la place Foch. La famille demeure au n° 63 de la rue de Bretagne jusqu'en octobre 1952, date à laquelle elle part pour Bordeaux. Daniel a trois mois et n'a donc pratiquement pas connu notre ville.

    C'est dans le sud-ouest de la France qu'il passe toute son enfance, élevé par un père sévère qui était allé s'installer à Pau en 1964, et qui aimerait le voir embrasser une carrière au barreau ou dans la politique. Daniel fréquente plusieurs établissements scolaires dont une école religieuse à Hasparren (Pyrénées-Atlantiques) et le collège Cendrillon de Dax. Élève moyen, il imagine volontiers, parce qu'il est bon en français, qu'il va faire Sciences-Po et devenir député.

    C'est sûrement au lycée qu'il se décide un jour à "faire le chanteur". Pourtant, en mai 1968, son goût pour la politique est déjà évident, voire prédominant. Il a bien évidemment choisi son camp et se passionne pour les nouveaux prêcheurs de ce printemps pas comme les autres. Un temps, il se sent attiré par les discours de Geismar et de Sauvageot. Lorsqu'il leur est directement confronté, il comprend les limites du discours politique. Il se laisse pousser les cheveux, sèche ses cours, ne s'entend plus avec son père, fugue et joue de la guitare héritée de son frère. Sans aucune hésitation il choisit alors la chanson qui lui permet d'aller à l'essentiel, trajectoire rapide et efficace. Le véhicule de la chanson se révèle le plus apte à traduire ses états d'âme, puisque celle-ci allie le fonds et la forme comme aucune autre forme d'expression. Il quitte donc le lycée sans passer son bac et, très vite, se forme à l'école draconienne du bal du samedi soir. Il se lance dans l'aventure des groupes sans lendemain et tourne beaucoup dans la région de Bordeaux en reprenant les succès des autres. Il ne se laisse pas pour autant bercer par le mirage de la sacro-sainte vocation. Il comprend très vite que la chanson est un métier. À cette époque, ses idoles sont Jimi Hendrix, les Rolling Stones et Johnny Hallyday, pour qui, plus tard, il écrira Je ne suis pas un héros.

    Il quitte donc sa région pour Paris à dix-huit ans et enregistre un 45 tours avec le groupe Présence. Echec! Le groupe se dissout. C'est à ce moment qu'il épouse Dominique Schroo, le 24 mars 1972, à Ivry-sur-Seine. La même année il réitère l'expérience 45 tours en solo, cette fois. Second flop. Il reste quand même à Paris et devient choriste en 1973. Il participe à la Révolution Française, comédie musicale montée au Palais des Sports. À force d'errer dans les studios il rencontre Patrick Juvet qui triomphe alors dans les hit-parades. Cela débouche sur une double collaboration. Daniel devient son choriste et lui écrit cinq chansons sur l'album Chrysalide.

    II- Le chanteur

    Léo Missir découvreur de talents, est touché par la voix originale de Daniel Balavoine. Il découvre surtout le personnage acharné, anti-conformiste, libéré de toutes contingences et diablement attachant. Il le convainc rapidement d'œuvrer en solo et mise sur lui pour une vraie carrière. Daniel veut réussir et n'éprouve aucune honte à vouloir gagner de l'argent. Après un album De vous à elle en passant par moi passé totalement inaperçu en 1975 et qui ne correspond pas vraiment à l'idée qu'il se fait lui-même de sa musique, il écrit en 1977, au retour d'un voyage en Pologne, ce qu'il considère comme son premier vrai album Les aventures de Simon et Gunther qui est un album-concept sur l'absurdité du mur de Berlin. Daniel aime raconter des histoires et son écriture s'apparente au style journalistique que l'on classerait alors facilement dans la rubrique "Fait de société". Au travers de ce disque, Balavoine surprend par le choix des thèmes qu'il décide de réactualiser. À vingt cinq ans, il est inhabituel de voir un jeune de sa génération se préoccuper de ce genre de problème. Par ailleurs, le mouvement punk frappe de plein fouet la culture rock partagée entre les valeurs psychédéliques et les poncifs du hard-rock. Balavoine ne se définit surtout pas comme un moderne. Il redonne simplement à la chanson dite "à message" une nouvelle dimension, moins militante, davantage axée sur le quotidien. Sans jamais faire partie du label de la nouvelle chanson française il est alors le symbole efficace d'un renouveau réel dans la chanson française. Malgré des passages fréquents en radio du titre Lady Marlène chanson phare de l'album, il ne réussit pas à faire de ce disque autre chose qu'un succès d'estime. Toujours aussi conscient d'exercer un métier il dit alors : "Je continuerai si je vends plus de 30.000 exemplaires de mon deuxième album". Ainsi fut fait grâce au simple Le chanteur qui fut un des tubes de l'année 1978. L'album qui soutient ce tube dessine très précisément le personnage Balavoine : un musicien attaché à donner un soin tout particulier à ce que l'on appelle les arrangements. Daniel lorgne déjà vers le travail effectué par les groupes anglo-saxons. Il comprend très vite que c'est à travers le son que la musique puisera désormais son universalité. Il n'oublie pas pour autant qu'il est Français et qu'il aime à faire partager ses idées. Il évoque donc ses préoccupations et livre à son public sa propre vision du monde.Pour beaucoup, déjà, il se révèle être un chanteur pamphlétaire. Une étiquette qu'il ne conteste pas et qu'il complète à l'époque de ses célèbres éclats en direct : "À chaque fois qu'il se passe quelque chose d'important, je réagis tout de suite et je réfléchis après..."

    Sur la lancée de ce troisième trente centimètres en solo, il se lance dans l'aventure de l'opéra rock Starmania dans lequel il incarne le rôle de Johnny Rockfort, zonard type des banlieues urbaines, qui finira de le conforter dans son image de chanteur révolté et d'écorché vif. C'est son premier vrai contact avec la scène et, surtout, la rencontre qui lui tient à cœur, celle de Michel Berger qui devient son meilleur ami dans le métier. Il n'aura de cesse de répéter son admiration pour celui qu'il considère comme le meilleur mélodiste français et travaillera à plusieurs reprises avec lui. En 1979 Daniel Balavoine écrit la musique du film Alors, heureux ? des frères Jolivet et y fait même ses débuts de comédien. Puis il sort son quatrième album Face amour, face amère. Certains commencent à l'attaquer sur son statut de "chanteur de variétés" et Daniel s'emporte contre les rock-critics qui ne veulent pas le reconnaître comme l'un des leurs. Alors, malgré tout, il s'emploie à démontrer qu'il travaille d'une façon inédite en mettant toujours en avant l'idée de groupe. Il fait d'ailleurs figurer le nom du sien, Clin d'oeil, à côté de son nom sur la pochette de cet album. Simultanément il campe définitivement son image de chanteur "mal dans son temps" en proclamant le droit au désespoir, peut-être dû en partie à son divorce qui est prononcé le 22 juin 1979. Parallèlement il se dit comblé par sa réussite et trouve même une certaine fierté à le dire tout haut : "À mon âge (il a 27 ans), je pense que si l'argent ne fait pas le bonheur, c'est quand même un excellent anesthésique du malheur. On vend notre salade, et parfois, elle est amère parce qu'il y a des larmes dedans. C'est aussi de cela qu'on vit. Être vendeur de larmes, ce n'est pas déshonorant."

    III- La grande gueule

    En 1980, Daniel Balavoine franchit une étape décisive dans sa carrière. Il y a d'abord son légendaire coup de gueule, le 16 mars, face à François Mitterrand qui n'était pas encore Président de la République. Il gagne son étiquette de chanteur engagé ou plutôt "d'artiste pensant" en s'insurgeant contre le discours du premier secrétaire du parti socialiste qui évoque à la télévision le passé controversé de Georges Marchais. Daniel le coupe et se fâche : "La jeunesse est désespérée, elle ne croit pas à la politique française. Méfiez-vous, le désespoir est mobilisateur, donc dangereux car il peut entraîner le terrorisme..." Les médias reçoivent parfaitement ces déclarations vitriolées et Daniel Balavoine devient en une semaine le porte-parole d'une jeunesse démobilisée par le débat politique. Alors il s'explique sur ses positions : "Le problème des idées, c'est qu'elles sont défendues par des hommes politiques. Le choix ne s'opère pas entre gens honnêtes et gens compromis, mais entre compromis de gauche et compromis de droite..." Du même coup, il devient une cible pour tous ceux qui guettent la démagogie au détour des engagements spectaculaires. On le dit payé pour enfoncer les portes couvertes.

    Il signe ensuite son cinquième album Un autre monde dont le titre Mon fils, ma bataille qui devient le deuxième tube de sa carrière finit de le classer dans la catégorie des "chanteurs populaires". Cette chanson lui est reprochée par ceux qui pensent qu'il vaut bien mieux que cette exploitation spectaculaire d'un thème qui mobilise les Français moyens. Il s'explique : "C'est une chanson comme une autre, et je ne crois pas qu'il faille s'arrêter aux chansons. Nous vivons malheureusement dans un pays dans lequel il y a des sujets rock et des sujets qui ne le sont pas. Je l'aime bien et je suis content qu'elle ait bien marché. C'est elle qui m'a permis d'enregistrer l'album suivant dans les meilleures conditions possibles. C'est une chanson populaire et ce n'est pas idiot d'être populaire."

    L'année 1980 voit donc Daniel Balavoine devenir une personnalité que les journalistes ont coutume d'interroger lorsqu'il est opportun d'évoquer la politique, la morale et le mode de vie. Il devient aussi un chanteur qui mobilise derrière lui un public de fidèles acquis à sa cause artistique. Son premier Olympia, qui est un triomphe, le révèle également comme une véritable bête de scène célèbrant avec énergie son amour du spectacle devant un public au garde-à-vous à ses moins vibrations. L'année 1981 passe. François Mitterrand devient Président de la République et la Gauche emporte les élections législatives. Avant même le raz-de-marée rose, Daniel déclare soutenir l'idée de gauche et se félicite de ce changement politique. Mais l'essentiel reste pour lui l'enregistrement de son sixième album avec une nouvelle formation. Maintenant, il travaille sur l'idée d'une dynamique sonore différente. Ce nouvel enregistrement est le prétexte à une phase nouvelle d'expérimentation. Il s'agit de convaincre les indécis et les détracteurs. Daniel ne cherche pas la sécurité et ne vise pas la flatterie d'un public bien déterminé. Il joue avec les symboles et les idées reçues qui lui collent à la peau. Sur la pochette, il se met en scène devant une cible à fléchettes. Il appelle son album Vendeurs de larmes et s'emploie même à écrire ses textes dans un style plus elliptique comme si le label de chanteur engagé lui déplaisait de par ses relents trop soixante-huitards. Daniel Balavoine correspond alors complètement à l'image des "décalés", terme et concept du sociologue Bernard Cathela pour désigner la frange de la population qui se définit comme dégagée du militantisme et du carcan politique. Il obtient pour cet album, le "Diamant de la chanson française" ce qui lui vaut de se produire pendant cinq jours à guichets fermés au Palais des Sports.

    Fort de ses nouveaux succès artistiques, Balavoine ressurgit comme témoin de son temps et honore une fois de plus sa réputation de fort en gueule. En octobre 1983, il participe à l'émission 7 sur 7. Interviewé sur les événements du Liban, il s'en prend vivement aux anciens combattants. Dans le même temps il dirige, sur une radio locale privée, une chronique quotidienne où il commente à chaud l'actualité. À nouveau il fait parler de lui. Son style est agressif, spontané, sans appel et il irrite beaucoup. Au même moment sort son septième album, Loin des yeux de l'Occident, avec lequel il inaugure un cycle musical et où sa volonté d'être reconnu un chanteur pop à part entière prime sur tout le reste. Du coup, Daniel réfléchit et fait marche arrière : "Je peux vous certifier que ce ne sera plus moi qui irai faire le clown pour dire ce que les autres taisent. J'irai, mais lorsque j'aurai choisi moi-même le moment d'y aller et non plus lorsque l'on m'invitera. Je choisirai les sujets à aborder. Fini le temps du "Veuillez vous asseoir à côté de la peau de banane que l'on va glisser sous vos pas dès que vous vous lèverez". Je suis avant tout un chanteur, qui n'en est pas moins un homme épris de liberté et d'espoir". Il ne veut plus être reconnu seulement comme un chanteur de variété : "Je veux juste être ressenti comme un produit différent de la variété traditionnelle, c'est-à-dire des disques qui se font en une ou deux semaines, avec des arrangeurs à la mode, des auteurs-compositeurs à la mode, des musiciens à la mode, dans le créneau du disque qui se doit d'être vite fait, bien fait, mais... à la mode".

    Puis Daniel Balavoine prépare son nouveau spectacle au Palais des Sports et en profite pour travailler sur un son nouveau et une structure de scène nouvelle pour s'aligner sur les productions des plus grands groupes anglo-saxons. Il met au point un système inédit d'éclairage, à base de projecteurs mobiles, programmé sur micro-processeur. Il en dépose les droits d'exploitation pour bénéficier de l'exclusivité. Parallèlement, il est un des premiers à travailler sur une structure de scène où les traditionnels amplificateurs disparaissent pour laisser la place au système "H.F.". En même temps, il emmène en tournée un analyseur de spectre pour adapter le son à chaque salle. Le grand public ignore ces préoccupations, mais constate l'extrême qualité de son spectacle.

    IV- L'aventurier

    Un autre public découvre "Balavoine l'aventurier" depuis sa première participation au Paris-Dakar en janvier 1983. Il aime le sport, l'idée de compétition lorsqu'elle comporte des risques et il éprouve le besoin de se surpasser. Il soutient ardemment son ami Thierry Sabine et il découvre en Afrique d'autres motivations que celles du raid automobile. Confronté à la misère et aux problèmes de malnutrition, il déclare alors : "Il faut revenir ici pour y faire autre chose."

    L'année 1985 est une année riche pour Daniel Balavoine. Il part en Écosse pour enregistrer son huitième et dernier album intitulé Sauvez l'amour. Après les deux derniers qu'il considère lui-même comme des plages d'expérimentation, il parvient à travailler sur un produit qu'il veut accompli, cohérent et beaucoup plus personnalisé. Il tend vers un équilibre entre des textes plus simples dans le message et une musique extrêmement sophistiquée. Ainsi, celui qui fut le pourfendeur d'idées repart au combat avec le plus vieux thème qui soit : l'amour. Il construit son disque autour de l'idée du retour au sentiment avec une notion d'espoir dans chaque chanson. Dans le même ordre d'idées, il s'implique dans ce tourbillon humanitaire qui frappe tout à coup les artistes français. Il est présent sur le front du racisme et de l'Ethiopie. Il se fait un devoir de participer au concert en faveur de ce pays le 16 octobre 1985 à La Courneuve. En ce qui concerne le racisme, il déclare : "Il ne suffit pas de porter le badge de S.O.S. Racisme, il faut le penser. Il ne faut pas dire "Je suis contre Le Pen", il est mieux de dire "Je suis pour les races". Celui qui veut faire croire qu'il n'y a pas de fossé entre les races a tort. Je crois qu'il y a une différence énorme de moeurs et de culture. Il faut franchir le fossé, s'aimer et se respecter. Il est plus fort d'aimer quelqu'un pour ses différences que pour les points communs que l'on a avec lui".

    Cependant, il prend ses distances avec la politique politicienne. Il annonce : "La politique ne m'intéresse plus. Si on me demande de parler de certains problèmes, je le ferai en dehors de tout conditionnement politique". Daniel Balavoine accepte la proposition de Lionel Rotcage relative à la création des comités Action École. "Il s'agit, dit-il, de faire rassembler, par les enfants, dans leurs écoles, les matières premières, riz, sucre, farine, pouvant nourrir les enfants des pays africains miséreux. Pour qu'un jour n'existent plus tous les grands fléaux du monde, le racisme, la guerre, la misère, ce sont les mentalités qu'il faut changer. Pour les adultes, c'est trop tard, mais je fais confiance aux enfants..." Cela nécessite un minimum d'actions publiques ou publicitaires, mais en revanche cette action implique une dépense d'énergie sur le terrain sans qu'il soit besoin d'alerter à chaque fois les médias. Daniel préfère les actions concrètes à titre individuel aux cautions au titre de personnage public. Il s'adresse donc à la Fondation de France qui doit mettre en place l'infrastructure nécessaire à la répartition des cent pompes solaires à eau, destinées à lutter contre la sécheresse, qu'il va emporter au Sahel. Puis, Daniel s'inscrit à la cellule S.O.S. Racisme de sa propre commune à Colombes et il décide de diriger l'opération "Paris au cœur" sur le Paris-Dakar, qu'il ne court pas, sans en informer les médias qui n'ont parlé de l'opération qu'après la tragédie qui lui a coûté la vie. De même, il décide de verser les droits de la chanson Un enfant assis attend sous la pluie vendue à 200.000 exemplaires et représentant 300.000 francs, pour les opérations d'Action École sans le notifier sur l'album. Balavoine devient alors aux yeux des journalistes le "Conquérant de l'utile". Cela lui plaît parce qu'il veut faire disparaître peu à peu toutes les connotations péjoratives attenantes au terme de charité. Cette sérénité lui confère un équilibre et une force à l'image de son dernier album. Daniel se bat en militant actif. Il fait parvenir de l'argent aux Restaurants du cœur de Coluche et distribue les fonds récoltés par Chanteurs sans frontières. Il veut profiter utilement de l'importance accordée au rallye par les médias pour collaborer intelligemment avec les institutions africaines et apporter ce fonds de solidarité aux pays du Sahel gravement touchés par la désertification et la famine.

    Après avoir participé au rallye en 1983 et 1984 en tant que concurrent, il veut cette fois se servir de ses structures pour distribuer les pompes à eau dans les pays sous-développés. Il pense que le fait de se servir de la notoriété du Paris-Dakar n'est pas en soi quelque chose de négatif. Il dit : "Un homme, qui en 1986, meurt de faim est une insulte à soi-même et à l'humanité tout entière". Balavoine s'en va donc courir l'Afrique pour secourir les autres. Il doit réaliser chaque jour des reportages sur les lieux mêmes où il s'arrête afin de sensibiliser les Français. Les cassettes enregistrées à vif seront diffusées sur quatre-vingt-dix radios F.M. couvrant toute la France.

    VI- Le drame

    Et puis, au Mali, c'est le drame brutal, injuste. L'hélicoptère qui le transporte avec quatre autres personnes, percute une dune de trente mètres de hauteur, la seule sur cent cinquante kilomètres, le mardi 14 janvier 1986 à 19 heures à 8 kilomètres de Gourma-Rharous. Les membres de l'hélicoptère étaient à la recherche de concurrents pris dans une tempête de sable. Est-ce "l'effet miroir" qui entraîne une confusion entre le ciel et la terre ? Est-ce les mauvaises conditions de visibilité ? Est-ce une panne mécanique ? Nul ne le saura sans doute jamais. Seul témoin de l'accident, le concurrent n° 347 Charles Belvèze, ne pouvait plus que donner l'alerte au bivouac de Gourma-Rharous. Le corps de Daniel Balavoine est rapatrié le 17 janvier. Les deux jours suivants une chapelle ardente est ouverte au funérarium de Suresnes-Nanterre pour ceux qui veulent lui rendre un dernier hommage. Ses obsèques sont célébrées le 20 janvier à 16 heures en l'église de Sainte-Eugénie à Biarritz et il est inhumé au cimetière de Sabaou. Pour respecter sa volonté, aucune fleur, ni couronne, ne sont déposées auprès de sa tombe.

    VI- À Alençon

    À Alençon le mercredi 15 janvier à 11 heures est prévue l'émission Casino-Parade de R.T.L., animée par Fabrice. Tout est réuni pour que la fête soit totale. La salle du théâtre est pleine et enthousiaste. Un artiste, Yves Duteil, et une organisation sans la moindre faille. Autant dire qu'il ne faisait de doute pour personne que ce Casino-Parade allait être un grand moment. Et puis soudain, le drame. Un flash spécial qui tombe à 10 h 47 sur les télex. La mort a frappé dans les sables du Dakar. Parmi les victimes, Daniel Balavoine, un enfant de la cité des ducs, et un technicien de R.T.L. Jean-Paul Le Fur. L'émission débute dans un quart d'heure et, en coulisses, c'est la consternation, l'émotion qu'il faut pourtant vaincre parce que le spectacle doit continuer. À 10 h 58, Fabrice livre la nouvelle juste avant le flash pour éviter les mouvements de foule. Stupeur et refus d'y croire. Un silence de cathédrale tombe sur le théâtre. Quatre cents personnes, tout sourire, sont là pour une fête et voilà qu'on leur annonce la mort. Le drame du Paris-Dakar va planer pendant deux heures. Le malaise s'installe dans les travées. Seuls, les gosses insouciants ne réalisent pas et l'animateur Fabrice s'efforce de remonter la pente, essayant d'entraîner avec lui le public visiblement choqué. Il a beau applaudir ce public, tenter d'oublier l'actualité, les flashes d'informations qui martèlent l'émission le ramènent à la dure réalité. Yves Duteil, en professionnel, ne se dérobe pas. Il chante Qu'advient-il de nous quand nos yeux se sont fermés ? Texte admirable et voix qui frémit. La salle communie mais le malaise persiste. Ce n'était pas prévu et c'est sa façon à lui de rendre, sur le vif, un hommage à Daniel Balavoine, avec qui, pourtant, il ne partageait pas les mêmes conceptions musicales, ni les mêmes choix politiques. "Mais quand même, dit-il, nous étions de la même famille". À 13 heures les infos dissèquent l'accident. Le public se lève, l'équipe de R.T.L. part. Quelques minutes plus tard les voitures filent vers Paris. Il pleut sur Alençon. Le jeudi matin, les élèves d'une classe de 5e du collège Balzac décident d'observer cinq minutes de silence en hommage aux cinq victimes du rallye Paris-Dakar. Un geste touchant qui mérite d'être souligné.

    VII- Je n'suis pas un héros

    La mort de Daniel Balavoine prive la chanson française d'un artiste en parfaite harmonie avec le discours adulte et généreux qui préside depuis quelques années dans le rock mondial. Avec lui, elle avait enfin l'esprit rock. Il avait dans ses projets un spectacle au Palais des Sports en septembre 1986, où il voulait à nouveau opérer une révolution sonore et former un groupe à destination du marché anglo-saxon, dans lequel il redeviendrait un parmi d'autres. Daniel réalisait un à un ses projets et témoignait, par ce fait, d'une organisation de sa carrière extrêmement précise. À 34 ans, il laisse derrière lui un petit garçon de trois ans et Corinne, sa compagne d'origine marocaine, qui est l'inspiratrice de L'Aziza. Cette dernière accouchera, en juin suivant, d'un enfant qui ne connaîtra pas son père. Ses coups de gueule passionnés ont fait de Daniel Balavoine plus qu'un chanteur. Ses révoltes étaient fréquentes parce qu'il se savait privilégié et qu'il rêvait d'un monde qui change et voulait combattre l'injustice. C'est pour cela qu'il était dans l'hélicoptère qui s'est écrasé dans le désert et pour apporter aux déshérités le fruit des campagnes faites en leur faveur. "Je m'emporte pour ce qui m'importe" est devenue aujourd'hui la phrase clé du personnage Balavoine. La mort l'a effectivement emporté pour une cause humanitaire qui lui importait de réussir. En 1980 Daniel chantait Je n'suis pas un héros. Il est pourtant mort en héros des temps modernes le 14 janvier 1986. Selon les légendes les héros ne meurent jamais et on peut affirmer que Daniel Balavoine est toujours vivant et bien vivant à travers son action humanitaire et qu'il vit en plein désert car à travers la fondation qui porte son nom son œuvre s'est amplifiée.

     

    LE SQUARE DANIEL BALAVOINE

    Le square Daniel Balavoine est situé dans le quartier de Perseigne à proximité de la tour Pascal. C'est le 1er juin 1992 que le conseil municipal décide, les travaux d'aménagement étant sur le point d'être achevés, de lui donner le nom du chanteur sur la suggestion des riverains.


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  • Romancier né à Tours en 1799 et décédé à Paris en 1850, il est célèbre pour son œuvre gigantesque en quatre-vingt-dix volumes, La comédie humaine, décrivant la société française de la Révolution jusqu'au règne de Louis-Philippe.

    Mais lorsqu'il se rend à Alençon en 1825, il n'a guère publié que quelques romans populaires ou historiques sous divers pseudonymes. S'improvisant éditeur, et bientôt imprimeur puis fondeur de caractères, il vient de se lancer dans la publication des œuvres de La Fontaine et de Shakespeare. Le premier illustrateur qu'il a choisi pour le volume de La Fontaine est Pierre Godard III. Un contrat sera de fait signé avec le graveur alençonnais, mais jamais exécuté. En ce bref séjour cependant, Balzac s'est imprégné de l'atmosphère et de lieux d'Alençon, qu'il conservera en mémoire.

    Trois ans plus tard, l'éditeur-imprimeur-fondeur Balzac est réduit à la faillite. Il se remet à l'écriture et projette un grand roman historique, Les Chouans, considéré comme la première pierre de l'édifice de La comédie humaine. En 1828, il se rend à Fougères pour se documenter. En passant, il s'arrête une nouvelle fois dans notre cité, à l'auberge du More, sur l'emplacement du café-brasserie de La Renaissance. C'est un immeuble vétuste avec une cour, des écuries et des jardins qui se perdent dans la campagne, par lesquels nous voyons sortir les compagnons du terrible Marche-à-Terre. C'est probablement à son retour de Fougères que Pierre Godard lui remet le plan de la commune qu'il a publié l'année précédente. Ce plan lui est précieux pour décrire notre ville dans laquelle il situera plus tard l'action de deux de ses ouvrages La vieille fille et Le cabinet des Antiques. Un troisième roman, L'envers de l'histoire contemporaine, a pour cadre notre région. Enfin, l'écrivain avait projeté de placer dans notre cité une pièce de théâtre dont nous n'avons que l'ébauche, Tableaux d'une vie privée, et quelques évocations de notre localité apparaissent dans plusieurs tableaux de la Comédie humaine.

    Honoré de Balzac a fait connaître le nom d'Alençon, des lieux et monuments, parfois peu connus comme les bords de la Briante derrière la rue aux Sieurs, aux lecteurs du monde entier et aux Alençonnais eux-mêmes. L'Alençon de 1830 revit grâce à sa puissance d'évocation et on peut même considérer qu'il a sauvé certains sites de la démolition en les décrivant, les plaçant ainsi sous sa protection.


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  • Louis Barillet est né à Alençon en 1880 dans une maison située sur l'emplacement de la galerie marchande du Pont-Neuf. Après avoir fait ses études à l'école Saint-François-de-Sales, il est admis à l'École des beaux-arts. Il se lance ensuite dans la sculpture, la gravure, les médaillons et la miniature, disciplines dans lesquelles il excelle. À partir de 1904, il expose au Salon des artistes français et, en 1905, ses reproductions sont couronnées de lauriers. Jusqu'à la Première Guerre mondiale, il réalise des fresques. À son retour de la Grande Guerre, il fonde dans la capitale un atelier de maître-verrier et devient un novateur de premier plan.

    Ses réalisations sont trop nombreuses pour être citées ici et je me limiterai à quelques-unes de celles effectuées dans sa ville natale. À l'église Notre-Dame d'Alençon, il orne la chapelle du baptistère de Sainte-Thérèse-de-l'Enfant-Jésus et réalise la statue de Jeanne d'Arc dans celle qui lui est consacrée, trois grandes baies vitrées et des vitraux dans le baptistère, des mosaïques et des vitraux à la chapelle Saint-François-de-Sales et le monument aux Morts de la Première Guerre mondiale.

    Louis Barillet s'intéresse également au vitrail civil et réalise des vitraux noir et blanc pour des cafés, des restaurants, des casinos, des magasins, des villas, des appartements, des salles des fêtes, etc.

    Louis Barillet s'éteint à Clamart (Hauts-de-Seine) en 1948. Son œuvre sera poursuivie par son fils Jean, décédé en 1997.

    Une rue d'Alençon porte son nom depuis 1963.


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  • Auguste Becquembois est né à Épernon (Eure-et-Loir) en 1851.

    En 1878, il quitte la faculté de Paris avec le titre de docteur en médecine et s'installe dans notre ville. Médecin de l'hôpital et aux chemins de fer, chargé de la visite des filles publiques qui se prostituent en dehors des maisons de tolérance, le docteur Becquembois est très dévoué à ses malades, se rendant immédiatement à leur appel de jour et de nuit. Philanthrope, il se consacre tout entier à sa profession. Pauvres ou riches trouvent chez lui le même accueil et le même dévouement. Sa simplicité n'a d'égale que sa bonté et son désintéressement va même jusqu'à l'excès. En 1907, il est atteint d'une maladie qui le tient cloué dans un fauteuil nuit et jour, pendant dix-huit mois, dans lequel il s'éteint en 1909.

    C'est pour rendre hommage à sa mémoire que son nom est donné, la même année, à la rue du Plénître dans laquelle il demeurait.

     


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  • Pierre Belard est né à Rouen vers 1662. Reçu docteur en Sorbonne après de brillantes études à Paris, il est attaché à la congrégation de Saint-Sulpice. Nommé curé de Notre-Dame d'Alençon il prend possession de sa cure en 1694. Au cours de son ministère, il développera la Providence, communauté de jeunes filles pieuses. Lors du "grand hiver" de 1709, désirant assurer la pérennité de cette œuvre qui avait adhéré à la manufacture du Point de France, il transforma l'établissement en une congrégation religieuse. Par ailleurs, il fut l'un des bienfaiteurs les plus actifs et les plus généreux de l'hôpital général à qui il légua ses biens.

    Pierre Belard, décédé en 1729, "recommandable pour sa charité envers les pauvres et pour avoir combattu contre les hérétiques", a laissé un Inventaire des titres, papiers et enseignemens concernants la cure d'Alençon avec un mémoire précis des titres antiens et modernes de toutes choses en 1720. Ce manuscrit, très important pour l'église Notre-Dame et la ville d'Alençon, a été publié en 1895 par la Société historique et archéologique de l'Orne. Tous les documents sur lesquels Pierre Belard a travaillé ayant disparu, son ouvrage n'en est devenu que plus précieux.


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